Smart Homes : notre nouveau rapport au logement (2/3)
Quelles sont les grandes tendances attendues en 2020 et à quels nouveaux défis les acteurs du marché de la Smart Home devront faire face ?
En début de mois, nous vous avons présenté quelques chiffres montrant une démocratisation rapide et croissante des objets connectés des Smart Homes.
Dans cet article, nous allons tenter de vous donner un aperçu des différentes solutions Smart Homes et des grandes tendances attendues cette année.
Depuis janvier 2020, les revenus du marché français de la maison intelligente s’élèverait déjà à 1,8 milliards d’euros (selon les prévisions de marché Statista).
Si l’épidémie du covid-19 impacte la chaine de production et de distribution des objets connectés, certaines solutions Smart Home ont d’autant plus trouvé leur sens auprès des consommateurs :
Les ventes des objets qui améliorent les capacités bureautiques à domicile ont connu une augmentation significative (« similaires à celles des périodes de Noël ou de Black Friday » selon HP France) : imprimantes, ordinateurs, caméras, tablettes, liseuses, claviers, webcams, casques audios, etc. ;
La croissance des robots de cuisine a été également dopée par le confinement : « nos ventes de robot de cuisine ont été multipliées par deux depuis le confinement observe l’e-commerçant Cdiscount » nous informe Le Parisien ;
Les écrans intelligents pour les appels vidéo ont également été de plus en plus utilisés.
Si vous souhaitez en savoir davantage sur ces évolutions, nous vous invitons à lire notre premier article sur les Smart Homes : ici.
I- Les objets connectés et intelligents de la maison
Commençons par une définition brève des objets connectés.
Ce terme désigne les « objets ayant la particularité d’être, comme leur nom l’indique, connectés entre eux via Wi-Fi, Bluetooth ou tout autre protocole de communication leur permettant d’échanger des informations » (selon Statista). Ces objets améliorent les expériences des consommateurs selon leurs usages.
Appliquées au logement, ces solutions nous permettent de tout contrôler sans fil dans la maison, depuis son smartphone ou sa tablette avec une application spécialisée.
Depuis quelques années, on assiste à un engouement pour ces objets connectés (voir chiffres du marché). Cet enthousiasme s’explique notamment par la simplification des installations mais également par une vraie réflexion sur le design des nouveaux objets connectés.
#1 - Certains acteurs ont repris des appareils du quotidien et les ont transformés en appareils intelligents et contrôlables
Ainsi, la première vague d’innovation a consisté à connecter les appareils de tous les jours de nos maisons à Internet. Ces innovations ont ainsi rendu les endroits où nous vivons plus confortables, sûrs et divertissants.
Nous pouvons citer l’exemple des réfrigérateurs de Samsung et LG. Ces réfrigérateurs connectés à Internet permettent de contrôler à distance sa température, d’établir une liste de course en se basant sur son contenu ou encore de consulter des recettes de cuisine depuis son écran connecté.
Le canapé est également impacté par la vague par Miliboo Connected qui propose le premier canapé connecté avec haut-parleurs, éclairages modulables et système de recharge à induction intégrés.
#2 - D’autres solutions ont radicalement changé notre façon de fonctionner dans la maison, notamment avec le contrôle par la voix des enceintes connectées
En 2019, le marché des enceintes connectées a atteint un nouveau record et représente 146,9 millions d’euros (soit une hausse de 70% entre 2018 et 2019 selon Strategy Analytics).
Ces assistants vocaux tirent le secteur des objets de la Smart Home vers le haut et pourraient battre de nouveau leur record cette année malgré l’épidémie du covid-19.
Pratiques et faciles à utiliser grâce aux commandes vocales, ces haut-parleurs intelligents pourraient proposer d’autres fonctionnalisés cette année. On pense notamment à l’intégration d’une intelligence artificielle et à l’inter connectivité avec les autres objets de la maison que certains fournisseurs ont déjà commencé à mettre en place. Nous développerons plus en détail le sujet - majeur - de cette interopérabilité des objets plus loin dans l’article.
Notons enfin qu’Amazon et Google sont les principaux fournisseurs de ces appareils, avec une part de marché combinée d’environ 90% en Amérique du Nord et en Europe.
#3- Les objets connectés deviennent des plateformes de services : Product-as-a-service
Prenons l’exemple d’une ampoule. Lorsqu’on y ajoute un capteur qui la connecte à Internet, l’ampoule offre désormais une palette de services liés par exemple à la consommation d’énergie ou encore au système de sécurité.
Les initiatives liées aux services sont encore rares ou peu développées (se limitent souvent au SAV), mais le développement d’une large gamme de services est possible.
Concernant les modèles économiques, les objets connectés en tant que fournisseur de services ont une diversité de modèles envisageables : les objets en freemium, les services complémentaires (add-on), les IoT marketplaces (les produits devenant des points de vente comme le Dash Button d’Amazon ou les objets self-service et les imprimantes qui lancent la commande de cartouches d’encre dès qu’elles en ont besoin en toute autonomie) ou encore les abonnements.
Les nouveaux services liés à ces objets connectés sont innombrables, ce qui nous fait penser que l’avenir des objets connectés n’a pas fini d’évoluer.
II- Le classement des objets de la Smart Home : entre confort et sécurité
Nous nous sommes concentrés dans cet article sur les innovations en termes de confort et de sécurité. Un futur article sera réservé aux solutions de management de l’énergie dans les maisons.
Caméra de sécurité connectée, thermostat connecté et intelligent, climatiseur connecté, poubelle connectée, ampoules intelligentes, capteurs de sommeil connectés, serrures de porte connectée et intelligente, station de météo, porte de garage connectée, télévision connectée, … nous avons assisté à une multiplication des solutions mais aussi à une accélération de la demande des consommateurs conscient des avantages liés à ces technologies.
Le point de départ de cette accélération en France est marqué par le lancement de la Google Home en aout 2017.
Quel est le classement actuel des produits les plus demandés ?
Les robots de cuisine occupent le haut du classement avec une croissance de 21% entre 2018 et 2019. Moulinex se distingue avec ces quatre robots de la gamme Cookeo mais le Thermomix de Vorwerk et le robot multifonction de KitchenAid ne sont pas très loin derrière. Thomson, Kenwood, Bosch, Tefal, Fimei, Eisenbach, Medion, Fagor, Simeo, Magimix, Silvercrest, Miogo et H.Koenig se sont également positionnés sur le créneau.
En deuxième position, nous retrouvons les robots aspirateurs (+90%). Le groupe allemand Vorwerk est l’un des précurseurs car s’est depuis 1929 positionné sur le secteur des aspirateurs et proposent aujourd’hui une gamme de robot haut de gamme pour un entretien optimal des logements. iRobot, Neato Robotics, Xiaomi, Amibot, Cecotec, Dyson, Electroluc, Eufy, iLife, LG, Miele, Moneual, Proscenic, Roborock, Rowenta, Samsung, Severin, et Zaco sont également des acteurs de ce marché. Ainsi, grâce à une caméra, des capteurs intégrés et une application mobile, l’utilisateur peut démarrer, interrompre, arrêter ou programmer l’aspirateur, même en dehors de la maison.
Arrivent ensuite les enceintes connectées et les assistants vocaux, avec Google en première position sur le marché français.
Parmi les autres produits les plus populaires, nous retrouvons les thermostats intelligents. Ils assurent un confort pièce par pièce avec la possibilité de conditionner individuellement différentes zones de la maison.
Par exemple, la start-up Ween s’attaque au marché des thermostats intelligents. Grâce à sa solution d’analyse prédictive qui exploite les données géolocalisées, la technologie Ween est capable de baisser la température et de la remonter en fonction de vos aller-retours.
On retrouve également les ampoules intelligentes, dont Signify est le leader incontesté et les autres produits de l’éclairage connectés. Les autres fournisseurs du segment comprennent Ledvance, LIFX, Sengled, Merkury Innovations et IKEA.
Enfin, les systèmes de sécurité sont également beaucoup sollicités. Ces solutions proposent des services de plus en plus complets pour l’intérieur et l’extérieur de la maison.
A titre d’exemple, nous pouvons citer les serrures de porte connectées qui sécurisent votre logement mais vous assurent également une expérience optimale en ouvrant automatiquement la porte d’entrée si vous vous en approchez les mains pleines.
Grâce aux avancées technologiques (intelligence artificielle, internet des objets, réseaux, robotiques), le secteur pourrait s’enrichir demain de nouveaux produits, encore rare sur le marché actuel. En effet, seulement 3 à 5% du gros électroménager est transformé en modèle connecté et les nouveaux entrants sur le marché ne manquent pas d’idées pour améliorer le quotidien à la maison.
III- Les grandes tendances et enjeux des prochaines années
#1 - accroitre la standardisation et l’interopérabilité entre les solutions Smart Home
Certains fabricants ont déjà amorcé l’interopérabilité de leurs appareils avec d’autres mais ce mouvement va et doit se démocratiser. Pourquoi ?
Pour empêcher les consommateurs de se retrouver liés à un fournisseur de réseau particulier ;
Pour éviter aux consommateurs de devoir utiliser une série d’applications différentes pour configurer et contrôler tous les différents appareils de différents fabricants ;
Parce que s’appuyer sur un mélange de solutions différentes peut entrainer des vulnérabilités de sécurité ;
Parce que cela permet aux fabricants d’appareils intelligents pour la maison de capter une clientèle plus large.
Récemment, Apple, Google et Amazon se sont associés pour développer l’ « Open-Source Smart Homes Standard », une norme destinée à garantir que les appareils fonctionnent ensemble, à faciliter le développement de nouveaux appareils et à sécuriser tout le processus. Le projet vise à garantir que tout appareil domestique intelligent fonctionnera dans votre maison, quel que soit le smartphone ou l’assistant vocal que vous utilisez.
Ces trois géants de la tech forment un groupe appelé Projet Connected Home over IP, qui sera également rejoint par le Zigbee Alliance (Comcast, Ikea, Kroger, Leedarson, Legrand, Lutron, NXP Semiconductors, Resideo, Samsung Smart Things, Schneider Electric, Signify, Silicon Labs, Somfy, …). Ils ont l'intention de publier un premier projet fin 2020. Pour l'instant, il est difficile de dire exactement ce que la norme sera capable de faire mais l'objectif reste de garantir que les appareils fonctionnent dans les trois écosystèmes des géants. Ce sera une grande victoire pour les clients qui devraient avoir plus de facilité à déterminer si un gadget donné fonctionnera réellement pour eux.
#2 - l’apprentissage automatique
Cette année, nous pouvons nous attendre à voir davantage de technologies basées sur l'IA. Si la plupart des objets sont pour l’instant seulement « connectés », ils deviendront « intelligents ».
Bien sûr, certains appareils le sont déjà, comme les systèmes de thermostats intelligents de Ween, Nest ou Honeywell qui utilisent l'apprentissage automatique pour adapter leur comportement aux habitants d'une maison, en se basant sur l'observation puis la reproduction de leurs habitudes.
Grâce aux progrès de l'intelligence artificielle, les maisons équipées de ces objets intelligents pourront en apprendre davantage sur leurs occupants et ainsi pourront anticiper leurs besoins.
La société IoT Crestron, par exemple, travaille sur un logiciel qui suit les habitudes d'une personne, comme la musique qu'elle veut entendre le matin ou les lumières qu'elle veut allumer à un certain moment de la journée. Une fois que le logiciel a compris les préférences de l’utilisateur, il lit automatiquement les bonnes playlists ou atténue automatiquement les lumières avant le coucher par exemple. «C'est vraiment la prochaine étape évolutive d'une véritable automatisation», déclare John Clancy, chef de l'activité résidentielle de Crestron.
#3 - l’exploitation des données collectées
L’un des plus gros enjeux de demain des solutions de la Smart Home est l’exploitation des données collectées par les appareils. La consommation d’énergie, les habitudes de vie, les conditions de vie, … les informations collectées sont multiples et leur valorisation ouvre le champ à de nouveaux services. Les initiatives sont encore rares, mais le développement d’une large gamme de service est possible.
#4– les soins à domicile
L’un des enjeux de l’exploitation des données collectées par les appareils domestiques intelligents concerne le domaine médical. Ces données peuvent offrir un aperçu 24h/24 et 7j/J de l’état des patients, ce qui permet un meilleur suivi et de meilleurs soins des patients.
Un des objectifs attendus dans ce secteur concerne les services d’intervention liés aux objets connectés. Par exemple, un appareil qui permettrait de se connecter à distance avec des médecins, d’alerter les soignants lorsqu’une personne âgée tombe chez elle ou encore de diagnostiquer des maladies en utilisant l’intelligence artificielle.
A titre d’exemple, la société de robinetterie pour salle de bain Toto a expérimenté des toilettes à prélèvement d’urine, pour vérifier les signes d’éventuels problèmes de santé.
Au deuxième semestre 2020 est normalement prévu le lancement du miroir Poséidon de CareOS. Grâce à ce miroir de la salle de bain, nous pourrons accéder à toutes les informations nécessaires pour évaluer et améliorer nos routines, et en savoir plus sur notre santé.
La start-up française JIB utilise ces technologies pour favoriser l’autonomie à domicile des personnes ayant un handicap. Elle propose une solution JIB Home, qui s’adapte facilement aux logements et abordable (de 1000 à 3000€ selon le type d’installation contre 3000 à 10 000€ pour les solutions de domotique handicap classiques).
#5 – les robots
Les robots leaders des produits connectés pour la maison auront également un rôle à jouer dans la future Smart Home. Nous avons cité plus haut les robots de cuisine et les robots aspirateurs mais d’autres solutions se développent depuis ces dernières années comme le chien robot Aibo de Sony, l’armoire qui plie le linge de Foldimate, le robot de repassage de la startup Effie, ou encore le robot laveur de vitres de Ecovacs Robotics. Concernant les projets futurs, la société Nvidia travaille sur un bras robotique intelligent qui peut agir en tant que sous-chef personnel de son propriétaire.
IV- Les freins à la massifications des solutions Smart Home
Pour conclure, nous avons choisi de mettre en avant quelques enjeux clés que les acteurs de la Smart Homes se doivent de prendre compte. En effet, ces défis peuvent devenir des freins à l’engouement pour la maison intelligente.
#1 – la dépendance des objets connectés à l’électricité
Le déploiement mondial de la 5G et la technologie WiFi améliorée comme WiFi 6 assurent un des réseaux plus rapides et puissants et donc un meilleur accès aux données et aux ressources du cloud. Ces réseaux plus rapides assurent un avenir encourageant pour les maisons qui pourront devenir encore plus intelligentes. La 5G par exemple permet aux appareils de fonctionner sans fils et câbles tout en consommant une quantité minimale d’énergie. La 5G permet également de connecter beaucoup plus d’appareils simultanément.
Toutefois, ces solutions sont et seront encore plus dépendantes de l’électricité. Les fabricants se doivent donc de prendre en compte les situations de coupure ou panne de courant. Il s’agirait de ne pas empêcher les consommateurs de pouvoir ouvrir leurs volets électriques connectés en cas de coupure d’électricité.
De plus, ces objets connectés en permanence grâce à ces réseaux génèrent une exposition des habitants à des ondes électromagnétiques qui peuvent être nocives pour la santé. Afin de mieux informer les consommateurs, l’ancienne ministre de la Santé, Agnès Buzyn et le ministre de l’Économie Bruno Le Maire ont annoncé fin 2019, l’obligation d’affichage dans les lieux de vente et les publicités, du débit d’absorption spécifique (DAS) pour tous les appareils radioélectriques. Cette obligation, visant pour l’instant uniquement pour les smartphones, s’appliquera à partir du 1er juillet 2020.
#2 –De la confidentialité des données à leur protection contre les cyber-attaques
Quelles données sont collectées, comment et où sont-elles envoyées ?
D’après l’Observatoire Promotelec 70% des français interrogés « veulent avoir la certitude que les données recueillies par les objets connectés pour la maison ne puissent pas être volée ou transmises sans leur accord ». Alors si nous observons une adoption croissante des objets connectés de la maison, les interrogations sur la protection des données demeurent encore très présentes. Les fabricants ont donc un réel travail à faire auprès des consommateurs pour gagner leur entière confiance.
Selon le FBI, le premier réflexe à adopter est de consacrer un réseau WiFi distinct pour les objets connectés que celui utilisé par les autres équipements (ordinateurs, tablettes, smartphones). Le FBI fournit ainsi quelques conseils en matière de sécurité à destination des propriétaires d’objets connectés, disponibles ici.
Comment protéger les données personnelles des cyber-attaques ?
Le nombre de cyber-attaques se multiplient depuis plusieurs années. Le rapport publié en octobre dernier par Kaspersky estime que 105 millions de piratages ont eu lieu durant le premier semestre de 2019 (soir neuf fois plus qu’au premier semestre de 2018). A la même période, le cabinet Wavestone dévoile dans son étude sur les cyber-attaques dans le monde de l’entreprise que la majorité des pirates présentent peu de capacités techniques et agissent par opportunisme, sans cible précise en tête. Ces attaques pourraient donc être facilement contrées, à condition d’être identifiées suffisamment tôt.
La sécurité des équipements et des protocoles devient donc l’affaire de tous les acteurs des objets connectés, quelle que soit leur place sur la chaine de valeur. Le lancement du label européen de sécurité pour les solutions connectées « IoT Qualified as Secured » (IQS) en juin dernier pourrait être la pierre inaugurale d’un mouvement qui devrait s’amplifier. Ce label lancé par la société Digital Security propose un premier indicateur indépendant qui permet aux utilisateurs de disposer d’une information fiable sur les produits qu’ils souhaitent acquérir. Pour en savoir davantage sur comment se protéger des cyber-attaques, nous vous invitons à lire les best practices de Kaspersky.
Le mauvais usage des données personnelles par les acteurs de la Smart Home pourrait devenir un frein à la massification de ce marché. La sécurité des données personnelles doit devenir l’affaire de tous les acteurs du marché des objets de la Smart Home.
En conclusion, lorsque les consommateurs seront rassurés par les acteurs des Smart Homes, ces derniers pourront prétendre adresser davantage de consommateurs. La maison laisse encore un panel de nouveaux usages et solutions à proposer, ainsi que de nouveaux business models à expérimenter. Les bénéfices liés aux objets et services de la Smart Home continueront donc de se développer et d’enrichir l’expérience des propriétaires et locataires de logements qui deviennent de plus en plus connectés et intelligents.